Entre Inde, contrôle de la nourriture, jeûne et … la déesse Kali !

Voilà que dans moins d’une semaine je serai de retour en Inde. J’ai du mal à y croire, je m’attends à rien et à tout pour être honnête. Sur le papier il s’agît d’une belle occasion de partager un maximum de choses, dans la réalité je sais qu’il peut en être tout autrement, à l’image de cette conclusion après chaque voyage là-bas : on ne décide pas de ce qui nous arrive. Une vérité probablement amplifiée par cette terre si spéciale mais qui est vérifiable partout. 

Il y a des voyages physiques qui s’apparentent à celui vers le soi et vous avez sûrement entendu des récits quant à ceux en Inde ou encore en Amazonie qui ont changé la vie de leurs conteurs. On dit qu’il faut être prêt pour ça, particulièrement prêt. La première fois que j’ai entendu ça de la bouche d’un indien, depuis mon regard d’occidentale control freak bercée par les discours marketing, je pensais à une façon de vendre son pays, tout comme nous aurions pu crier un cocorico strident à tout étranger satisfait après une bouchée de macaron. J’étais loin du compte. 

Pour une personne qui voulait de façon superficiellement contradictoire contrôler et s’en foutre de tout, c’était quelque peu difficile de se laisser aller à l’expérience locale qui paraissait de prime abord joliment freestyle. Il est impossible de ne pas ressentir qu’il y a quelque chose de spécial dans l’air quand bien même on peut se convaincre que c’est l’effet du jetlag. 

Et puis, forcément, il est difficile de passer à côté de la rébellion du mental qui n’aime pas ne pas savoir ce qu’il va se passer dans les détails, ce qu’il va y avoir dans l’assiette et si on est vraiment obligé de manger…genre…vraiment ? Puis de toute façon, il est toujours possible de ne plus rien manger, non mais ! Et c’est bien ce qu’il s’est passé, sans ne rien pouvoir contrôler au bout de quelques semaines, je me suis mise à jeûner. Seule chose qui pouvait me rassurer, me donner une once de confiance en moi et de maîtrise de la situation.

La coïncidence a fait que j’ai suivi le jeûne en l’honneur de la déesse Kali, sans le savoir. Les indiens étaient très étonnés de mon comportement qui s’alignait avec le leur. Ils m’ont alors conté l’histoire de cette déesse bleue à plusieurs bras qui tire la langue, collier de cranes autour du cou. Cette déesse qui même si elle paraît peu amiable tue tous les démons sur son passage mais qui par excès de rage va jusqu’à éliminer son propre mari. Au passage, je m’excuse de la simplification de cette histoire, auprès de ceux qui la connaissent bien. J’étais exactement là-dedans : l’excès de contrôle, de recherche de la perfection, de toute puissance du mental qui décime…jusqu’à atteindre ce qu’il y a de plus cher, aveuglement. Peu importe l’intention première, si bonne ou justifiée fut elle, le laxisme donne les plein pouvoirs au mental et l’excès qui peut en découler rend aveugle. 

Ce fut un signal fort, je pensais décider du cours des choses et me retrouvais devant cet évènement comme prise au piège par quelque par chose de plus grand qui venait de façon claire m’amener le message suivant : ta radicalité ne va faire qu’éteindre ce qu’il y a de plus précieux pour toi. Et même dans un énième moment de recherche de contrôle, le message était là. 

J’étais effrayée de déposer l’armure du tout contrôle au sol et de marcher au grès de ce qui doit être mais surtout exister pleinement sous bien des filtres. J’étais démunie devant ce mental que je ne savais à peine voir tellement qu’il prenait tout l’espace. J’avais une peur bleue des conséquences sur mon corps, mon poids, mon identité, mon rapport au monde…mais que faire face à des messages aussi percutants, qui se répètent et rattrapent en toute circonstance ? 

J’ai donc arrêté le jeûne. Ce fût le dernier. C’était en octobre 2018. 

Ce fût une étape marquante parmi d’autres sur le chemin de la paix avec moi-même. Le jeûne lui-même a permis son propre arrêt parce que c’était le moment, comme toute chose qui s’imbrique sans que l’on ne comprenne tout de suite le sens mais qui en trouvent avec un peu de recul.  

Du coup, au fil du temps et des expériences qui ont suivi, j’ai pu faire ressortir de cette expérience les conclusions non exhaustives suivantes : 

  • Nous ne décidons pas de tout et peu importe les situations les messages sont là, passent et reviennent tant que nous ne les voyons pas, 
  • Tout ce qui est excessif détruit, 
  • Le contrôle est relatif voir illusoire, 
  • Les raisons du contrôle sont personnelles et réelles, 
  • Le mental peut prendre beaucoup moins d’espace et être à sa place quand la connaissance le concernant est là et que le laxisme à son égard n’est plus, 
  • Nous n’avons pas d’effort à faire pour passer du fait d’être à exister en tant que soi, unique, 
  • L’identité est un socle qui ne devrait pas dépendre des croyances que nous avons vis-à-vis de nous-même, 
  • La pleine conscience ouvre la vue à ce qu’il y a de plus cher : la vie, 
  • La vie est équilibre et nous porte toujours vers celui-ci. 

Si Kali est souvent perçue à travers ses excès, elle est également considérée comme un symbole d’émancipation, de libération. Elle est aussi celle par la suite qui empêchera l’arrivée de nouveaux démons. J’ai cœur à croire qu’il faut aller jusqu’au bout de ce que l’on doit vivre, que tout arrive à point nommé et que les déclencheurs ou triggers convertissent les situations, protègent des difficultés du passé. 

Quand je repense à cette histoire, je souris tout comme les indiens que j’ai rencontré qui ne sont pas tellement étonnés des tenants et aboutissants de première. 

Kali, merci. 

Et merci à toutes les Kali qui s’expriment de bien des façons dans la vie de chacun à travers des évènements qui transforment. Qu’ils nous ouvrent davantage les yeux, nous portent vers nous-même encore plus, dans le sens de l’équilibre et de la vie ! 

À propos de l'auteur

Je m’appelle Alexia Michel et je suis la fondatrice de Yoga & Peanut Butter. De la Chine en passant par l’Inde à la France, du marketing digital au yoga, de l’anorexie à la guérison… je vous dis tout dans l’onglet “qui suis-je”.